Qu’est-ce que la pédagogie critique publique ?

 

La pédagogie publique critique s’oppose à la fois à la pédagogie mythifiante (la métapolitique de l’extrême-droite) et à la pédagogie hégémonique (l’idéologie dominante dans le capitalisme néolibéral).


La pédagogie publique critique peut désigner le « travail de la culture », aussi bien, dans l’Education populaire politique ou sur Internet (ex : chaînes twitch, compte twitter ou instagram….) par exemple.


- Le recours à l’expérience vécue des personnes socialement opprimées :


La pédagogie critique publique fait entendre la voix des personnes socialement opprimées, à la différence de la pédagogie hégémonique qui les spectacularisent, et de la pédagogie mythifiante qui essaie de faire passer les oppresseurs pour des victimes.


- Une pédagogie dialogique :


La pédagogie publique critique essaie de favoriser les pratiques pédagogiques qui permettent de mettre en œuvre du dialogisme (ex : pratiques participatives dans l’éducation populaire ou en ligne).


L’absence de dialogisme caractérise plus spécifiquement les pratiques de la pédagogie hégémonique (ex : presse, radio, télévision…).


Néanmoins, on peut remarquer que la pédagogie mythifiante peut avoir recours à des médias interactifs sur Internet.


- La problématisation de la réalité sociale :


La pédagogie mythifiante prétend également problématiser la réalité sociale. Mais cette problématisation passe par des schémas intentionnalistes. Cela veut dire qu’elle raisonne en termes d’intentions cachées (comme dans le complotisme).


La pédagogie critique publique cherche à mettre en lumière des rapports sociaux structurels ou systémiques (ex : rapports sociaux capitalistes, système patriarcal, racisme systèmique…)


- Les savoirs des sciences sociales critiques :


La pédagogie critique publique se distingue de la pédagogie mythifiante par son usage des sciences sociales critiques. Cela veut dire le recours à des concepts ou à des études statistiques quantitatives issues de recherches académiques.


Pour la pédagogie mythifiante, les sciences sociales académiques sont discréditées d’office car l’Université serait aux mains de la « gauche » et des « gauchistes ».


La pédagogie hégémonique pour sa part s’appuie plus particulièrement sur des approches en sciences sociales qui partent d’une conception individualiste de la société.


Néanmoins, les études statistiques des sciences sociales mettent à jour l’existence de groupes sociaux qui statistiquement partagent une condition commune d’inégalités sociales et de discriminations.


L’argument de la pédagogie mythifiante d’une hégémonie des « gauchistes » sur l’Université est inexacte car il existe des controverses entre les tenants d’une science sociale individualiste (qui nourrit la pédagogie hégémonique) et les tenants d’une science sociale critique (qui nourrit la pédagogie critique publique).


- La conscientisation : La prise de conscience que vise la pédagogie publique critique consiste à dépasser la dimension interindividuelle (pédagogie hégémonique) et la vision intentionnaliste (pédagogie hégémonique). Il s’agit de percevoir les problèmes comme des rapports sociaux systémiques dont la réalité peut être mise à jour par des statistiques.


- Les inédits possibles : La pédagogie critique publique se distingue de la pédagogie hégémonique car elle refuse la conscience fataliste qui affirme qu’« il n’y a pas d’alternatives ». Mais, elle se distingue également de la pédagogie mythifiante qui nous promet un avenir dystopique jouant sur la peur de l’autre.


- La praxis : La pédagogie critique publique est orientée, à la différence de la pédagogie hégémonique, vers l’engagement dans des mouvements sociaux d’émancipation. Au contraire, la pédagogie hégémonique tend à discréditer les mouvements sociaux.


Les mouvements d’émancipation sont définis par Albert Ogien comme des mouvements où des groupes sociaux luttent contre leur oppression sociale.


Les tenants d’une pédagogie mythifiante pour leur part peuvent tenter d’infiltrer des mouvements sociaux (comme les Gilets Jaunes ou des ZAD). Mais leur usage des mouvements sociaux n’est pas tourné vers l’émancipation vers un projet social discriminatoire.


Conclusion : Comme on le voit, le rapport aux sciences sociales critiques est une dimension très importante pour distinguer la pédagogie critique publique de la pédagogie hégémonique et de la pédagogie mythifiante. Ce rapport constitue une boussole pour déterminer qui sont les opprimés et les oppresseurs ou encore pour produire le processus de conscientisation.


- La pédagogie hégémonique tend à s’appuyer sur des analyses qui partent de l’idée d’individu et de société des individus. Elle peut s’appuyer pour ce faire sur les approches qui en philosophie, sociologie ou économie mobilisent l’individualisme méthodologique.


- La pédagogie mythifiante s’appuie sur l’idée d’intentionnalité derrière les phénomènes sociaux. Les phénomènes sociaux s’expliqueraient parce qu’il y a des groupes de personnes qui agissent intentionnellement et de manière concertée.


- La pédagogie publique critique s’appuie sur l’idée que les phénomènes sociaux peuvent s’expliquer comme des mécanismes structurels sans présupposer l’existence d’intentions cachées. Ces mécanismes structurels sont mis en lumière par des études statistiques macrosociologiques.

Posts les plus consultés de ce blog

Comment l’éducation populaire peut-elle lutter contre l’extrême-droite ? (et comment reconnaître l’extrême-droite?)

Analyse de trois idéaux types de la pédagogie publique